Changement de cap

Depuis quelques jours, ma vie va changer... Mais quelle drôle de tournure de phrase... Et pourtant, c'est exactement ça. 

Dans le plus grand secret, alors que personne de mon entourage ne s'en doutait, je préparais un concours. J'ai été d'une exemplarité sans nom, jamais je ne me suis plainte, je ne le pouvais de toutes façons pas puisque c'était un secret que je partageais avec moi. Le jour, alors que tout le monde pensait que je m'adonnais à des activités ménagères, genre regarder la télé et trouver de nouvelles émissions passionnantes, je travaillais sans relâche. La nuit, alors que tout le monde me pensait endormie, je révisais sans bruit, cachée derrière mon écran d'ordinateur que je n'éteignais que pour aller me glisser dans mon lit avant que la maisonnée ne s'éveille. Personne ne savait ce que je préparais, personne pour m'encourager les jours des différentes épreuves, écrites ou orales. Non. J'étais seule, l'esprit gonflé de cette fierté de mener ma barque sans personne, de ne pouvoir compter que sur moi. Je prenais soin de moi physiquement afin d'être au top, mes moments de détente, je les consacrais à me concocter de petits plats équilibrés, un esprit sain dans un corps sain, telle était ma devise. Lorsque j'ai appris mes résultats, j'ai d'abord savouré quelques heures, puis c'est à la plus grande surprise de tous que j'ai annoncé mon succès. Pensez-vous! Comment auraient-ils pu imaginer que j'avais abattu un tel travail en solitaire, sans aucun soutien, sans rien laisser paraître. J'ai été l'héroïne d'un jour, et je crois bien que certains de mon entourage racontent encore mon histoire, toujours aussi ébaubis par tant de volonté et si peu d'atermoiements (aucun en fait).

La même dans la vraie vie: personne dans mon entourage n'a pu échapper à ma préparation. Mon mari a dû écourter ses journées de travail pour que je puisse bosser, mes amis ont été le réceptacle de plaintes très utiles genre "J'en ai maaaaarre! J'y arriverai jamaaaaaiiiis! C'est plus de mon âââââge!", ma soeur a eu droit à des coups de fil juste pour m'entendre gémir, mes enfants ont dû se passer de moi pendant des vacances, j'expliquais à qui voulait l'entendre ce que je faisais et à quel point ça me gonflait... J'ai stressé comme une gamine, j'ai pleuré de découragement parce que je n'avais pas le temps de tout travailler tout en décidant que je pouvais bien continuer à suivre Master Chef et CSI. En dehors des repas, pendant tout le temps passé à bosser, je me nourrissais sans arrêt de Cars-en-sac et de Côte d'or au lait-noisettes. Et comme ça me faisait mal au ventre, je buvais du Coca. Le jour des premières épreuves orales ma voisine a fait le trajet de tram avec moi par sms et c'était bien parce que je n'avais pas envie d'être seule. A la sortie de chaque épreuve, j'avais des textos de personnes qui voulaient savoir comment ça s'était passé. Tout le monde attendait mes résultats et lorsque je les ai eus, j'ai passé un nombre incalculable de coups de fil pour annoncer d'une voix suraigüe que j'avais réussi.

La deuxième version est moins glorieuse. Mais je la préfère! 

Ah, et au fait, à la rentrée, je suis maîtresse!